La campagne #DecolonizeHistory ("Décoloniser l’Histoire") – également appelée #MayflowersKill (“Les Mayflowers tuent") – est un partenariat entre les peuples autochtones d’Amérique et Survival International. L’objectif de la campagne est de donner une visibilité mondiale à l’histoire du génocide des Autochtones sur le continent américain et à travers le monde ; de révéler comment cette histoire se répète sur d’autres continents et de montrer comment elle peut – et doit – être stoppée.
Mais avant tout, qu’entendons-nous par “décoloniser l’histoire” ?
Il est important de comprendre que notre histoire collective a été écrite d’un point de vue eurocentriste et colonialiste, et donc sans prendre en compte l’existence d’autres réalités, qui sont pourtant bien réelles. C’est ce qui a, en partie, permis de justifier le vol de terres et, par conséquent, les violences qui en découlent.
Par exemple, si l’on “découvre” un territoire, cela sous-entend que personne ne s’y trouvait auparavant et qu’on peut donc légitimement se l’approprier. C’est le sens de la fameuse locution “terra nullius”, “territoire sans maître”, utilisée par les colons pour envahir notamment l’Australie.
Faire face à son passé, c’est se permettre de se reconstruire sur des bases plus saines. C’est reconnaitre et pouvoir, en partie, agir sur les traumatismes – engendrés par la colonisation, le racisme, le vol des terres et la violence génocidaire – de peuples entiers, et ce sur des générations.
L'arrivée de Christophe Colomb
Il y a plus de 500 ans, le 12 octobre 1492, l'expédition dirigée par Christophe Colomb atteignait une île des Bahamas appelée Guanahani par ses habitants autochtones (les Tainos), que les conquistadors espagnols rebaptisèrent San Salvador. Ce fut le premier contact durable entre les Européens et les habitants des Amériques.
Mais l'arrivée de Christophe Colomb sur le continent américain a marqué le début d'une histoire d'extermination par des maladies importées contre lesquelles les Autochtones n'avaient aucune immunité, mais aussi par la violence, l'esclavage, le pillage, le vol des terres et des ressources, qui se poursuit aujourd'hui encore.
On estime que, pour la seule année 1600, 56 millions d'Autochtones sont morts à la suite de l'arrivée des Espagnols sur le continent américain (environ 90 % de la population).
L'histoire du Mayflower
Quelques années après, en 1620, une centaine de réfugiés puritains arrivèrent en Amérique du Nord à bord du Mayflower. Ayant échappé à la persécution et à la discrimination en Angleterre, les colons furent aidés par les autochtones afin de survivre sur cette terre nouvelle et – pour eux – hostile. Aux yeux de ceux qui y vivaient depuis des temps immémoriaux, il s'agissait bien sûr d'un environnement abondant qui avait depuis longtemps été façonné et sauvegardé par ses habitants afin de pourvoir aux besoins des générations futures.
Les colons ne rendirent pas l’accueil qui leur avait été réservé. Le débarquement du Mayflower entraîna des siècles d'invasion, de guerre et de maladie qui tuèrent des dizaines de millions d'autochtones. Ce génocide et cette discrimination se répercutent encore aujourd'hui sur tout le continent. Elles se manifestent par des taux extrêmement élevés de pauvreté, de maladie, de violence domestique, de brutalité policière, d'emprisonnement, de suicide et par la faible espérance de vie des autochtones d'Amérique du Nord par rapport aux descendants d'immigrants. Ces tragédies criminelles découlent du racisme perpétré par la société coloniale instaurée par les colons.
Malgré cela, les survivants qui en sont capables continuent à résister et à défendre leurs terres et leur identité.
Cette histoire se répète dans d'autres parties du monde, notamment en Amérique du Sud, où de nombreux peuples autochtones peuvent être victimes de premiers contacts mortels avec des personnes extérieures. Cela entraine régulièrement la mort d’au moins la moitié, et parfois bien plus, des membres des peuples concernés.
La COVID-19 n'est que la dernière en date des nombreuses maladies importées qui menacent la survie des peuples autochtones des Amériques. Leur survie est un élément essentiel de la diversité de l'humanité, dont dépend la biodiversité et dont nous dépendons tous.
Découvrez sur la carte ci-dessous d'autres témoignages d'Autochtones d'Amérique du Nord sur ce qu'ils pensent de l'arrivée du Mayflower (en anglais) :
1. Peters, Paula. Preface. Of Plymouth Plantation by William Bradford: the 400th Anniversary Edition, Kenneth P. Minkema, Francis J. Bremer, and Jeremy D. Bangs, 2020, I-XXIII.