Journée mondiale de l'enfance
Pour marquer la Journée mondiale de l’enfance, le 20 novembre, Survival International publie une galerie photo d’enfants indigènes qui met en valeur leurs modes de vie et expose les menaces qui pèsent sur leur avenir. (ATTENTION : cette galerie contient une image violente : n°5).
Des forêts tropicales d’Amazonie aux toundras glacées de Sibérie, les enfants indigènes sont les dépositaires des modes de vie, des langues et des écosystèmes des groupes auxquels ils appartiennent.
Durant des siècles, cependant, ces territoires ont été exploités (déforestation, mines, routes, barrages…) sans le consentement des peuples indigènes. Ils en sont aussi fréquemment expulsés.
La perte et la destruction des terres sont à l’origine d’une grande souffrance pour les enfants. La mortalité infantile, l’addiction des jeunes aux drogues et le suicide, ainsi que les maladies chroniques et une espérance de vie réduite sont autant de conséquences de l’assimilation forcée des peuples indigènes aux cultures dominantes.
© Mike Goldwater/Survival
Les enfants awá apprennent à survivre dès leur plus jeune âge dans les forêts luxuriantes de l’Amazonie brésilienne.
Les garçons jouent avec des arcs et des flèches miniatures pour s’entraîner à devenir de bons chasseurs tandis que les filles apprennent à cueillir les fruits et à faire du jus d’açai.
Tous les enfants développent une connaissance encyclopédique des forêts qui les environnent.
© Domenico Pugliese
Toutefois, ces savoirs sont en voie de disparition.
Malgré l’opération awá lancée par le gouvernement début 2014 pour expulser les envahisseurs du territoire de la tribu, certains d’entre eux sont revenus dans la forêt. Environ 30% de la forêt d’une réserve awá légalement protégée ont déjà été abattus par les bûcherons et les éleveurs de bétail.
Les étrangers arrivent, c’est comme si notre forêt était en train d’être mangée, explique Takia Awá.
Même s’ils sont tout à fait auto-suffisants, les Awá isolés sont extrêmement vulnérables aux dangers du monde extérieur. Ne jouissant que d’une très faible immunité contre les maladies importées, un simple rhume peut anéantir une communauté entière.
Survival appelle maintenant les autorités brésiliennes à mettre en place un programme de protection permanente des territoires pour éviter d’autres invasions.
© Fiona Watson/Survival
À l’arrivée des Européens en Amérique du Sud il y a plus de 500 ans, les Guarani furent parmi les premiers peuples à être contactés.
Alors qu’ils occupaient autrefois un territoire de près de 350 000 km2 de forêts et de plaines, ils s’entassent aujourd’hui sur de petites parcelles de terre encerclées par des fermes d’élevage et de vastes plantations de soja et de canne à sucre. Certains n’ont plus aucun territoire et vivent dans des campements de fortune le long des routes.
Au cours des trois dernières décennies, plus de 625 Guarani se sont donné la mort. La majorité des victimes étaient âgées de 16 à 29 ans, la plus jeune n’avait que 9 ans.
© Paul Patrick Borhaug/Survival
(ATTENTION : image violente)
Si les Guarani se suicident c’est parce qu’ils n’ont plus de terre, affirme un Guarani.
Autrefois nous étions libres, mais aujourd’hui nous ne le sommes plus. Alors nos jeunes pensent qu’il ne leur reste plus rien.
Ils s’assoient et pensent, ils se perdent et se suicident.
© João Ripper/Survival
J’ai grandi comme un chasseur, dit Roy Sesana. Je ne sais pas lire. Mais je sais lire la terre et les animaux. Tous nos enfants en sont capables.
Les Bushmen sont les premiers habitants de l’Afrique du Sud. Pendant des milliers d’années, ils ont développé des techniques de chasse qui leur ont permis de répondre aux besoins de la communauté sans détruire l’environnement.
Les enfants s’entraînaient à la chasse avec des arcs et des flèches taillés à leur mesure et on leur apprenait à tirer sur des rats, de petits oiseaux et des lièvres ou à fabriquer des couvertures en peau de gazelle. Les petites filles à peine âgées de cinq ans aidaient leurs mères à cueillir des plantes, des baies et des tubercules. Les enfants apprenaient à être à la fois courageux et humbles et on leur enseignait que la générosité devait être admirée et l’égoïsme rejeté.
Aujourd’hui cependant, depuis les expulsions forcées de leurs territoires de chasse au sein de la réserve du Kalahari central, beaucoup d’enfants bushmen vivent dans des camps sordides que leurs parents nomment ‘lieux de mort’, où le sida est répandu et où la privation de la chasse et des rituels ancestraux fait régner dépression et alcoolisme.
© Survival International
Au cours des dernières années, des rapports inquiétants ont révélé que des adolescentes et des jeunes femmes yanomami ont été victimes d’abus sexuels perpétrés par des soldats de l’armée brésilienne qui les ont attirés avec de la nourriture ou de l’alcool. Cette violence sexuelle a conduit à des grossesses non désirées et à des maladies sexuellement transmissibles.
Lorsque les soldats sont arrivés, ils ont commencé à nous harceler, dit Davi Kopenawa. Ils ont persuadé les femmes de coucher avec eux en leur offrant du riz et de la farine. Ils ont abusé de nos femmes. Maintenant, elles sont malades. Les soldats leur ont transmis des maladies comme la gonorrhée et la syphilis.
© Fiona Watson/Survival
Un enfant bushmen peut vivre avec ses parents à l’intérieur de la réserve jusqu’à l’âge de 18 ans, mais tout non-résident de la réserve doit, pour y entrer, obtenir un permis d’une validité d’un mois.
En septembre 2013, Survival International a appelé au boycott du tourisme au Botswana en réaction aux tentatives répétées du gouvernement d’expulser les Bushmen de la réserve du Kalahari tout en y promouvant un tourisme intensif qui utilise des images idylliques d’eux dans ses brochures touristiques.
Stephen Corry, directeur de Survival International, explique : Tant que les Bushmen n’auront pas le droit de retourner librement sur leurs terres ancestrales, leurs enfants ne pourront hériter du mode de vie unique de leurs ancêtres, ils ne connaîtront qu’une vie de dépendance, de désespoir et de maladie.
© Dominick Tyler
Les garçons yanomami apprennent à interpréter les traces des animaux, à utiliser la sève de certains arbres pour confectionner du poison de pêche à la nivrée et à grimper aux arbres les chevilles liées par des lianes.
À cette époque, ma mère m’emmenait toujours avec elle dans la forêt pour chercher des crabes, pêcher des poissons au timbó ou cueillir des fruits sauvages, raconte Davi Kopenawa, porte-parole des Yanomami du Brésil.
J’allais aussi avec elle dans les jardins quand nous avions besoin de récolter du manioc et des bananes ou couper du bois pour le feu. Parfois, les chasseurs m’appelaient aussi au lever du jour lorsqu’ils partaient en forêt. C’est ainsi que j’ai grandi dans la forêt.
© Claudia Andujar/Survival
Dans le bassin du Congo, une mère pygmée récolte des plantes sauvages et des noix dans la forêt tout en portant son bébé.
Les Baka au sud-est du Cameroun sont illégalement expulsés de leurs terres ancestrales au nom de la conservation, la plus grande partie de leur territoire étant transformée en ‘zones protégées’ – dont des zones de chasse au trophée. Ils risquent la détention, les coups et la torture aux mains des brigades anti-braconnage soutenues et financées par le Fonds mondial pour la nature (WWF).
© Kate Eshelby/Survival
De nombreux enfants baka, mbendjele et d’autres groupes pygmées souffrent aujourd’hui d’une carence en protéines due à la chute brutale de viande dans leur alimentation.
La chasse en Afrique centrale devient de plus en plus impraticable en raison, d’une part, d’une chasse excessive de la part d’étrangers à la région – due à une forte demande en viande de brousse destinée à alimenter les campements de bûcherons qui prolifèrent dans la région ainsi que les villes voisines -, et de l’autre, à la confiscation par les autorités du gibier légalement chassé dans plusieurs régions des parcs nationaux.
En République du Congo, des enfants mbendjele employés par les commerçants du marché pour nettoyer les latrines sont rémunérés avec des solvants à inhaler.
© Survival International
Le nord-est du Canada est une étendue subarctique de toundras, de lacs et de forêts. Les Innu y vivaient jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle et, en tant que chasseurs nomades, ils dépendaient exclusivement des hordes de caribous qui migrent à travers leur territoire au printemps et à l’automne.
Cependant, durant les années 1950 et 1960, les Innu ont subi des pressions du gouvernement canadien et de l’Eglise catholique pour s’installer dans des villages sédentaires. La dépossession de leur territoire qu’ils appellent Nitassinan a engendré du chômage, des problèmes chroniques de santé comme le diabète et des niveaux record de suicides et d’addiction à la drogue parmi les enfants innu.
Lorsqu’on leur demande de décrire comment on grandit dans ces villages, les jeunes Innu répondent invariablement Nous avons honte d’être innu.
(Photo : enfants innu, Davis Inlet, Canada).
© Dominick Tyler
L’addiction aux solvants est un problème extrêmement grave chez les enfants et les adolescents innu, l’obésité et le diabète sont également très répandus.
Le diabète de type 2 atteint désormais les enfants innu âgés de 10 à 18 ans. Cette forme de diabète qui ne s’est développée qu’après la sédentarisation des Innu, ne se retrouvait autrefois que chez les individus âgés de 40 ans et plus. Aujourd’hui, ce type de diabète apparaît très souvent chez les jeunes Innu de moins de vingt ans.
Les experts médicaux estiment que les jeunes atteints de diabète de type 2 ont deux fois plus de risques d’en mourir – et beaucoup plus rapidement – que ceux qui sont atteints d’un diabète de type 1.
Lorsque j’étais enfant, il y a 15 ans, il n’y avait chez nous ni diabète ni cancer. Nos grands-parents chassaient et leur nourriture était saine, explique Michel André, un Innu de Sheshatshiu.
Le diabète qui a atteint des proportions épidémiques dans les communautés autochtones menace leur existence même, explique le professeur Jean Claude Mbanya, président de la Fédération Internationale du diabète.
© Dominick Tyler
Les Penan, de l’Etat du Sarawak en Malaisie, ont vu la forêt dont ils dépendent détruite par l’exploitation forestière, les plantations de palmiers et les barrages.
Des écolières penan ont été abusées sexuellement par des ouvriers des compagnies d’exploitaiton forestière. Cela arrive souvent lors du trajet de retour de l’école, celle-ci se trouvant à des kilomètres des habitations penan.
En novembre 2013, huit Penan, dont un garçon de 13 ans, ont été arrêtés sur le site du barrage et placés en garde à vue. Deux autres Penan, dont un adolescent de 16 ans, ont été arrêtés alors qu’ils venaient visiter leurs parents au poste de police.
© Andy Rain/Survival
Au Bangladesh, une mère chakma a couché son nouveau-né dans un berceau traditionnel appelé_dhulon_, et lui chante des berceuses olee daagaanaa pour l’endormir.
Depuis l’indépendance du Bangladesh en 1971, le peuple jumma des Chittagong Hill Tracts, les régions montagneuses du sud-est du pays, ont subi les pires violations des droits de l’homme en Asie.
Peuple doux et tolérant, les Jumma sont ethniquement et linguistiquement distincts de la majorité bengali.
© David Brunetti
De nos jours, les Jumma sont parmi les peuples indigènes les plus persécutés du monde.
Les abus sexuels à l’encontre des femmes et des jeunes filles jumma sont très répandus, les viols sont rarement dénoncés en raison des discriminations sociales.
Au cours des deux derniers mois, il a été signalé au moins 5 cas de violence sexuelle commis par des colons bengalis sur des jeunes filles jumma. Cela comprend le viol d’une petite fille chakma de quatre ans qui a été attaquée alors qu’elle se baignait dans un ruisseau.
Très peu de mesures ont été prises à l’encontre des responsables de ces crimes, explique Sophie Grig deSurvival International, les femmes et les jeunes filles jumma sont ainsi extrêmement vulnérables, leurs agresseurs agissant en toute impunité.
© Mark McEvoy/Survival
La plupart des peuples indigènes ont une vision de la vie à long terme ; ils tiennent compte dans leurs décisions quotidiennes de la santé future de l’environnement et du bien-être des générations à venir.
Pour que la vie des enfants indigènes contemporains ne soit pas corrompue par l’oppression, l’exploitation et le racisme, les gouvernements et les compagnies qui violent leurs droits devraient voir plus loin que les profits politiques et commerciaux immédiats qu’ils peuvent en retirer.
La question des peuples indigènes est de plus en plus évoquée dans les arènes politiques et culturelles. Mais ces peuples sont toujours vulnérables, en grande partie parce que leurs terres sont de plus en plus convoitées. Ils ont urgemment besoin que l’opinion publique mondiale rejoigne le combat de Survival en lui prêtant main forte dans les campagnes qu’elle mène pour qu’ils soient enfin considérés comme des égaux.
Un monde dans lequel les enfants indigènes seront libres de vivre sur leurs propres terres et de choisir leur propre mode de vie est un droit inaliénable. Et cela commence avec la reconnaissance de deux principes fondamentaux des droits de l’homme : le droit à la terre et à l’autodétermination.
Nous ne sommes pas ici pour nous-mêmes. Nous sommes ici pour nos enfants, nos petits-enfants et nos arrière-petits-enfants.
Un Bushman, Botswana.
© Survival International
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