Cette page a été créée en 2010 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.
Risque de génocide dû aux maladies et au vol de terres
Au cœur de la forêt amazonienne du Brésil vivent des Autochtones qui n’ont aucun contact avec le monde extérieur.
Les bûcherons clandestins et les éleveurs envahissent leurs territoires et introduisent des maladies. Si aucune mesure de protection n’est prise, ils ne survivront pas.
L’Amazonie brésilienne abrite le plus grand nombre de peuples non contactés au monde. La FUNAI, le département des affaires autochtones du gouvernement brésilien, estime leur nombre dans cette forêt à au moins une centaine de groupes.
Leur volonté de ne pas établir de contact avec les autres peuples autochtones ou avec les personnes de l'extérieur résulte très certainement de rencontres antérieures désastreuses, de l’invasion continue de leurs territoires et de la destruction de leur environnement forestier.
Par exemple, les groupes non contactés résidant dans l’État d’Acre sont probablement des survivants de l’époque du boom du caoutchouc, durant laquelle de nombreux Autochtones furent réduits en esclavage.
Il est probable que les survivants se soient échappés par les cours d'eau. Le souvenir des atrocités commises contre leurs ancêtres est sûrement encore profondément ancré dans leur esprit.
On sait très peu de choses sur ces personnes. Ce que nous savons avec certitude est leur volonté de rester non contactés. Elles accueillent les étrangers ou les avions qui les survolent avec des volées de flèches, ou elles évitent tout simplement le contact en se cachant dans la forêt.
Certains, comme les Awá non contactés, sont des chasseurs-cueilleurs nomades qui se déplacent constamment, capables de construire un abri en quelques heures et de l’abandonner quelques jours après.
D’autres sont plus sédentarisés, habitant des maisons communes, cultivant du manioc et d'autres plantes dans des jardins ouverts dans la forêt et pratiquant la pêche et la chasse.
Il pourrait y avoir 300 Autochtones non contactés vivant dans le territoire de Massacó, dans l’État de Rondônia. Ils utilisent de très grands arcs et flèches (un arc de plus de quatre mètres a été retrouvé) ressemblant beaucoup en style et en taille à ceux des Sirionó, peuple de la proche Bolivie. Ils doivent particulièrement apprécier les tortues, car des amas de carapaces ont été retrouvés dans des camps abandonnés.
Cependant, d’autres groupes non contactés, qui ne comptent plus que quelques individus, frôlent l’extinction.
Ces petits groupes dispersés se trouvent principalement dans les États du Rondônia, du Mato Grosso et du Maranhão. Ils sont les survivants de brutales expropriations et assassinats commis par des bûcherons, des éleveurs de bétails et autres.
Aujourd’hui, ils sont toujours chassés sans vergogne et leurs forêts qui constituent leurs foyers connaissent une destruction effrénée.
José Carlos Meirelles, ancien représentant de la FUNAI, tient
des flèches appartenant à des Autochtones non contactés.
© Gleison Miranda/FUNAI
Des projets de méga-barrages et de grandes routes, que le gouvernement envisage dans le cadre de son "Programme de croissance accélérée", représentent de grandes menaces.
Tous ces groupes sont très vulnérables à des maladies telles que la grippe ou le rhume transmis par le monde extérieur et contre lesquelles ils n’ont aucune immunité, ce qui constitue une bonne raison d’éviter le contact.
Mais malgré ces sombres perspectives, d'incroyables histoires de survie nous sont parvenues. Karapiru, un homme awá, a survécu à une fusillade puis a vécu tout seul pendant dix ans, se cachant dans la forêt, jusqu’à ce qu’il établisse finalement le contact avec des colons et vive avec d’autres Awá. Il est mort du Covid-19 en 2021.
Les peuples non contactés du Brésil doivent être protégés et leurs droits territoriaux reconnus avant qu’ils ne disparaissent à jamais, en même temps que la forêt dont ils dépendent.
Menaces
Tous les contacts avec les Autochtones non contactés du Brésil ont abouti à des catastrophes.
Ces groupes n’ont pas d’immunité contre les maladies habituellement bénignes, c’est ce qui les rend extrêmement vulnérables.
Il n’est pas rare que 50 % de la population d’un peuple succombe dans l’année qui suit leur premier contact à des maladies allogènes telles que la rougeole ou la grippe, amenées par des bûcherons, des missionnaires, des orpailleurs ou autres individus cherchant à s'emparer de leurs terres.
Ainsi, la moitié des Matis a disparu après leur premier contact. Jeunes et anciens, dont la plupart des chamanes, sont morts des maladies introduites.
Les conséquences d’une activité économique dans les régions où vivent les peuples non contactés sont souvent des conflits et de violents heurts .
De tels conflits ont eu pour conséquence la mort de quelques envahisseurs et de nombreux Autochtones.
Les trois derniers survivants du peuple akuntsu ont été victimes de plusieurs attaques après avoir été les témoins du massacre de leurs semblables et de la destruction de leurs maisons par les bulldozers des éleveurs.
Des peuples qui ne sont pas "inconnus"
Dans le monde entier, des peuples ont décidé de rester à l’écart de la société nationale et même des autres peuples autochtones.
Cela ne veut pas dire qu’ils demeurent "inconnus" ou "inchangés". La plupart sont déjà connus et quel que soit leur degré d’isolement, ils s’adaptent en permanence à l’évolution de leur environnement.
Beaucoup ont des contacts occasionnels, parfois hostiles, avec les peuples voisins. Ils savent très bien que d’autres sociétés les entourent.
Les groupes autochtones voisins et la FUNAI connaissent la plupart du temps la localisation approximative de ces groupes.
Depuis 1987, la FUNAI a un département consacré aux Autochtones non contactés, dont la politique consiste à ne pas établir le contact.
Au contraire, la FUNAI cherche à démarquer et protéger leurs territoires des invasions, grâce à des agents de terrain placés dans des postes de protection avancés.
Ils ne survivront que si leurs terres, sur lesquelles ils possèdent un droit au regard des législations internationales et nationales, sont protégées. Ils doivent pouvoir y vivre en paix, sans craindre le génocide ou un contact aux conséquences désastreuses.
Le contact ne doit être établi que lorsque et où les peuples en isolement volontaire le décident, lorsqu'ils sont prêts pour cela.
Les derniers représentants de leur peuple
Malheureusement, certains peuples non contactés ne comptent plus que quelques tous derniers membres. Voici quelques exemples parmi les plus menacés.
Les Piripkura du Mato Grosso
Nous ne savons pas comment ce peuple s’autodénomme, mais leurs voisins, les Autochtones du peuple gavião, les appellent les Piripkura , ou "peuple papillon" à cause de leur habitude de se déplacer sans arrêt dans la forêt. Ils parlent une langue tupi-kawahib, une famille linguistique que partagent plusieurs peuples du Brésil.
Les Piripkura comptaient une vingtaine de membres lorsque la FUNAI est entrée en contact avec eux pour la première fois, à la fin des années 1980. Après le contact, ils sont retournés dans la forêt. Depuis lors, le contact s’est renoué avec trois membres du peuple.
En 1998, deux hommes piripkura, Baita et Tamandua, sont sortis de la forêt de leur propre volonté. L’un d’eux était malade et fut hospitalisé.
Pendant la courte période qu’il passa à l’hôpital, il raconta que son peuple comptait peu de temps auparavant bien plus de membres, comment il avait été massacré par des Blancs, et comment son unique compagnon et lui avaient erré dans la forêt en chassant, pêchant et cueillant pour survivre.
Nous ignorons s’il y a d’autres survivants piripkura. Aujourd’hui, Baita et Tamandua sont en grand danger, leurs terres étant sans cesse envahies par des bûcherons illégaux, qui bloquent leurs sentiers forestiers pour les empêcher de chasser.
La FUNAI a promulgué une loi temporaire qui interdit à quiconque de pénétrer dans le territoire des Piripkura sans autorisation et qui y bannit toute activité économique. Mais si le gouvernement n’entreprend pas rapidement de démarquer officiellement leur territoire, les derniers survivants connus des Piripkura disparaîtront à jamais.
Les Kawahiva du Rio Pardo, Mato Grosso
On sait peut de choses sur ce groupe autochtone, mais on pense qu’il appartient au peuple des Kawahiva. Il y a quelques années, la FUNAI a estimé qu’ils devaient être entre 50 et 100 mais, aujourd’hui, ils sont sans doute encore moins nombreux.
On pense qu’ils ont cessé d’avoir des enfants à cause de leur fuite permanente devant l’exploitation forestière et autres invasions.
Étant toujours en déplacement, ils ne peuvent plus cultiver et doivent compter uniquement sur la chasse et la pêche.
Leur territoire n’est toujours pas protégé et, en conséquence, leur survie est très incertaine. Leurs forêts sont constamment attaquées par des exploitants forestiers principalement issus de Colniza, une des villes-frontières les plus violentes du Brésil, dans une des régions les plus déforestées d’Amazonie.
Les Korubo de la vallée du Javari
À la frontière du Brésil et du Pérou, la vallée du Javari concentre le plus grand nombre de peuples autochtones non contactés du Brésil.
Un des groupes, les Korubo, sont appelés "caceteiros" ou "hommes-massue" à cause des grandes massues qu’ils utilisent pour se défendre.
En 1996, la FUNAI a établi le contact avec un groupe de trente Korubo, qui s’était séparé du groupe principal et demeure dans l’isolement, évitant tout contact avec les groupes environnants.
Des maladies mortelles introduites par le monde extérieur frappent les groupes contactés de la région, et on craint que ces maladies puissent être transmises à des groupes non contactés, avec les conséquences tragiques que cela implique.
Le "dernier de son peuple", Rondônia
On pense que cet homme était le dernier survivant de son groupe, qui fut probablement massacré par des éleveurs occupant le territoire autochtone de Tanaru, dans l’État du Rondônia.
Nous n'avons jamais su son nom, ni de quel peuple il faisait partie, ni quelle était sa langue. Il était connu pour les grands trous qu’il creusait pour se cacher ou pour attraper des animaux. Il rejetait catégoriquement toute forme de contact.
Dans le passé, beaucoup d'éleveurs avaient pour habitude de se servir d’hommes armés pour tuer les Autochtones non contactés dans l’État du Rondônia.
En août 2022, après environ 30 ans d'une vie solitaire et constamment en fuite, le "dernier de son peuple" est malheureusement décédé, visiblement de cause naturelle.
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