Le progrès peut tuer : des enfants 'pygmées' rémunérés en colle à sniffer et en alcool

26 Janvier 2016

Expulsés de force de leurs forêts, de nombreux groupes de chasseurs-cueilleurs d’Afrique vivent en marge de la société et sont vulnérables à l’exploitation. © C. Fornellino Romero/Survival

Cette page a été créée en 2016 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.

Un nouveau rapport de Survival International révèle que des enfants des forêts tropicales africaines ont été payés en colle à sniffer et en alcool pour des tâches subalternes qu’ils ont effectuées.

Le rapport mentionne qu’en 2013, en République du Congo, des commerçants ont rémunéré des enfants de la tribu bayaka en colle à sniffer pour le nettoyage de latrines.

Au Cameroun, les Baka – qui ont été illégalement expulsés de leurs forêts – sont souvent payés 5 verres d’alcool la demi-journée de travail. Nombre d’entre eux, en proie à la pauvreté et à la dépression causées par la spoliation de leurs terres, se tournent vers la boisson pour échapper à leurs problèmes.

Presque partout en Afrique centrale, les chasseurs-cueilleurs qui ont été dépossédés de leurs terres sont rémunérés en substances addictives, le plus souvent en alcool artisanal.

Atono, un Baka expulsé de force de son territoire, a raconté : ‘Nous sommes en train de tomber malades car notre alimentation a changé. Notre peau n’aime pas le soleil ni la vie au village. Dans la forêt nous sommes en bonne santé et nous prenons du poids. Mais désormais, plus personne n’est musclé, tout le monde a l’air malade. Nous sommes obligés de boire pour oublier nos problèmes’.

Pendant des générations, les Baka et autres peuples de chasseurs-cueilleurs ont vécu de manière durable dans la forêt tropicale africaine. © Edmond Dounias/Survival

Les problèmes de dépendance aux drogues et à l’alcool sont fréquents chez les communautés indigènes dont les terres ont été spoliées. Au Canada, les enfants innu, dont les familles ont été forcées à abandonner leur mode de vie nomade, en viennent à sniffer de l’essence à l’aide de sacs en plastique. De même, en Australie, le taux d’alcoolisme des communautés aborigènes est plus élevé que celui des Australiens non-aborigènes.

Boniface Alimankinni, un Aborigène des Îles Tiwi, témoigne : ‘Nous n’avions aucun respect pour nous-mêmes et rien à transmettre à nos enfants si ce n’est la violence et l’alcoolisme. Ils sont coincés entre un passé qu’ils ne comprennent pas et un avenir qui ne leur offre rien’.

L’addiction aux drogues et l’alcoolisme ne sont pas une fatalité pour les communautés indigènes. Ils sont la conséquence de l’échec des politiques qui ont imposé le ‘progrès’ et le ‘développement’ à des peuples dont le mode de vie traditionnel est largement autosuffisant. Les sociétés industrialisées les soumettent à la violence génocidaire, à l’esclavage et au racisme dans le but de leur voler leurs terres et leurs ressources ainsi que d’exploiter leur force de travail au nom du ‘progrès’.

Stephen Corry, directeur de Survival International, a déclaré : ‘Le rapport de Survival ‘Le progrès peut tuer’ montre qu’imposer le développement aux communautés indigènes ne fonctionne tout simplement pas. Même le nouveau système de santé n’est jamais en mesure de contrer les effets des maladies introduites et la destruction provoquée par l’accaparement des terres. Le développement forcé n’apporte jamais aux peuples indigènes une vie plus longue et plus heureuse mais au contraire, une existence plus courte et plus triste à laquelle ils n’échappent que par la mort. Le ‘progrès’ a détruit de nombreux peuples et en menace encore beaucoup d’autres; nous exhortons donc les Nations unies à se prononcer contre le développement forcé sur les territoires indigènes’.

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