Une figure majeure du Sénat indonésien réclame que des communautés autochtones non contactées soient protégées de l’exploitation du nickel

10 Juin 2024

Une récente vidéo montre deux hommes non contactés du peuple hongana manyawa faire signe à des conducteurs de bulldozers de ne pas pénétrer sur leur territoire © Anon

L’un des plus hauts responsables politiques indonésiens a déclaré que le gouvernement devrait protéger un peuple autochtone non contacté, dont le territoire est actuellement détruit par la plus grande mine de nickel du monde. 

LaNyalla Mahmud Mattalitti, l’une des figures majeures du sénat indonésien et proche allié du futur président Prabowo Subianto, a déclaré que le peuple hongana manyawa devait être protégé contre l’extraction de nickel sur ses terres. Il a demandé au gouvernement d’ “intervenir immédiatement pour assurer la protection de ce peuple autochtone”.

Des Hongana Manyawa non contactés vivent sur l’île d’Halmahera, située à environ 2500 km au nord-ouest de Jakarta. Ils pourraient être au nombre de 500. Ils refusent toute interaction avec des personnes de l’extérieur, et leur survie repose entièrement sur la forêt. Tout contact avec des personnes extérieures à leur territoire les exposerait à des maladies contre lesquelles ils n’ont aucune immunité et qui pourraient leur être fatales. La forêt qui constitue leur foyer repose sur de gigantesques quantités de nickel et est en train d’être détruite pour l’extraction minière. L’un de ces sites, qui représente la plus grande mine de nickel du monde, est opérée par Weda Bay Nickel (WBN), entreprise attirée par le boom mondial de ce minerai destiné aux batteries des véhicules électriques. 

Les opérations extractives sont dirigées par l’entreprise française Eramet, informée de la présence d’Hongana Manyawa non contactés sur leur concession depuis 2013, mais qui continue pourtant d’exploiter le nickel de leurs territoires. Eramet est déjà responsable de la déforestation de plus de 2000 hectares sur l’île d’Halmahera et compte déforester encore le triple. Or, les 6000 hectares de forêt tropicale concernés constituent une partie du foyer d’Hongana Manyawa non contactés, ce qui menace leur existence même.

La mine Weda Bay Nickel opérée notamment par l’entreprise française Eramet sur le territoire de membres non contactés du peuple hongana manyawa (Halmahera, Indonésie) © Survival

D’après LaNyalla Mahmud Mattalitti, la Constitution indonésienne de 1945 mentionne spécifiquement la protection des peuples autochtones. Il ajoute qu’il est crucial que les Hongana Manyawa puissent décider “en toute indépendance des questions relatives à leurs moyens de subsistance”. Il a demandé au gouvernement de la province des Moluques du Nord, dont dépend l’île d’Halmahera, de revoir ses réglementations de planification du territoire, de manière à ce que les Hongana Manyawa ne soient plus déplacés par l’activité minière. 

 Cette déclaration fait suite à la diffusion d’une vidéo virale montrant des Hongana Manyawa non contactés forcés, en raison de la destruction de leur forêt, de mendier de la nourriture auprès de mineurs de Weda Bay Nickel, entreprise responsable de cette même destruction.

Des membres non contactés du peuple hongana manyawa apparaissent sur un site d’extraction de Weda Bay Nickel. Ils sont à présent forcés de mendier de la nourriture auprès des entreprises qui détruisent la forêt qui constitue leur foyer. © Survival

Il s’agirait vraisemblablement de la première fois que le triste sort des Hongana Manyawa reçoit l’attention directe du gouvernement central indonésien. Cette intervention de LaNyalla Mahmud Mattalitti fait également suite à une récente annonce de Tesla, qui déclarait que l’entreprise envisageait la création d’une zone exempte d’activité minière afin de protéger les droits et les territoires des peuples non contactés en Indonésie. Tesla avait inclus cette possibilité dans son rapport d’impact 2023 après que plus de 20 000 sympathisants de Survival International ont envoyé des mails à plusieurs fabricants de véhicules électriques, à des compagnies minières opérant dans la zone et au gouvernement indonésien, afin de réclamer la création d’une zone interdite à l’extraction. 

LaNyalla Mahmud Mattalitti a déclaré : “Quelle que soit la forme qu’il prenne, je demande à ce que le développement ne déplace pas les communautés locales, notamment les peuples autochtones qui vivent sur le territoire et qui dépendent de la forêt.” Le temps presse : la récente vidéo démontre la rapide destruction de la forêt qui constitue le foyer des Hongana Manyawa.

Caroline Pearce, directrice de Survival International au Royaume-Uni, a déclaré : “Cette annonce sans précédent représente un possible salut pour les Hongana Manyawa non contactés. La solution est évidente : leur territoire doit être protégé et exempt de toute activité minière ou autre entreprise de “développement”. Eramet et les autres entreprises concernées doivent se conformer au droit international et cesser leurs opérations sur ces territoires, pour lesquels ils n’ont clairement reçu aucun consentement.”

Survival demande aux autorités locales et nationales indonésiennes de démarquer et protéger immédiatement le territoire des Hongana Manyawa non contactés, et d’établir une zone interdite à l’exploitation minière pour protéger ces communautés contre les impacts tragiques de l’exploitation minière et du contact forcé.

Caroline Pearce a également ajouté : “Le temps est compté pour les Hongana Manyawa non contactés. Leur territoire doit être protégé de toute urgence au moyen d’une zone interdite à l’extraction, avant qu’il ne soit trop tard.” 

 

Notes aux rédactions :


1. Entre 300 et 500 personnes du peuple hongana manyawa seraient aujourd’hui toujours non contactées (sur une population totale d’environ 3000 personnes) et pourraient être rayées de la surface du globe. L’extraction minière détruit leurs ressources alimentaires et les mineurs sont porteurs de maladies contre lesquelles les Autochtones non contactés n’ont aucune immunité. 

2. Survival demande à tous les fabricants de véhicules électriques, y compris Ford, Volkswagen et BYD, de s’engager à ne pas s’approvisionner en matériaux issus de territoires où vivent des communautés non contactées, ainsi qu’à respecter les droits des peuples autochtones, notamment en matière de consentement préalable, libre et éclairé, et demande à Tesla d’inscrire ces principes dans sa politique officielle.

Hongana Manyawa
Peuple

Partager