Sauf qu’il y a un problème majeur : depuis la création des premiers Parcs nationaux à la fin du XIXe siècle, des gouvernements et de grandes organisations de conservation expulsent des peuples autochtones de leurs terres, prétendant que la “nature” doit être protégée de ces peuples qui ont pourtant façonné les paysages dont il est question.
En Afrique et en Asie, de nombreux peuples autochtones font face à des violences visant à les expulser de leurs foyers, qui ont été transformés en Aires protégées. Pour un grand nombre d'entre eux, la “conservation” est devenue la plus grande menace à laquelle ils sont confrontés. La multiplication des Aires protégées pourrait devenir le plus grand vol de terres de l'Histoire.
Ce modèle de protection de la nature est dévastateur pour ses véritables gardiens, bafoue leurs droits et n'améliore en rien la biodiversité. Parce qu'il est terriblement enraciné dans les pratiques de conservation, nous avons besoin de votre aide pour le renverser.
Les peuples autochtones et leurs droits doivent être au cœur de la lutte contre la destruction de l'environnement et le changement climatique.
Actualités de la campagne
9 Décembre 2024
23 Septembre 2024
10 Juin 2024
27 Mars 2024
14 Décembre 2023
La conservation coloniale : un modèle raciste et violent
Le principe de la conservation coloniale, souvent appelée “ conservation-forteresse ”, est ancré dans la croyance coloniale selon laquelle les peuples autochtones ne sont pas capables de gérer leurs propres terres.
Par exemple, Steve Gartlan, ancien directeur de pays du WWF pour le Cameroun, était convaincu “qu'il est irréaliste et irresponsable de confier la protection de ces écosystèmes uniques aux communautés locales, qui n’ont ni les ressources ni les connaissances en biologie nécessaires à leur gestion.”
Ces croyances, qui perdurent dans le secteur de la conservation jusqu'à aujourd'hui, prennent leur source dans le racisme, s'appuient sur des données scientifiques biaisées et sont utilisées pour justifier le vol des terres autochtones. Il s'agit de colonialisme déguisé : de puissantes organisations volent des terres et des ressources de peuples autochtones tout en prétendant sauver la planète.
Des documentaires alléchants, le soutien de certaines célébrités et du contenu pédagogique ont permis aux conservationnistes de populariser une vision de la conservation qui considère la présence humaine, en particulier celle des communautés locales, comme une menace pour la nature. Ce modèle se développe depuis plus de 150 ans en opposition aux conceptions autochtones de la terre.
Au lieu de défendre les droits d'Autochtones dépositaires d'un savoir et d'une expérience considérables, les conservationnistes traitent ces derniers comme des intrus dans un espace fantasmé comme “naturel”, “pur” ou “sauvage”. Ce mythe biaisé et trompeur de la “nature” est utilisé pour décrire des régions du monde qui ont été façonnées et habitées par des peuples autochtones génération après génération, telles que l'Amazonie ou le bassin du Congo. Il permet de justifier les violations de leurs droits et le vol de leurs terres.
Une "mission" internationale
Aujourd'hui, des gouvernements du Nord global octroient des milliards de dollars et de l'argent de leurs contribuables à de grandes organisations de conservation pour des projets dans le Sud global, déterminant ainsi la manière dont la conservation est mise en œuvre sur les terres de peuples autochtones.
Des organisations de conservation bien connues telles que le WWF, la WCS ou African Parks encouragent la création d'Aires protégées, conseillent des gouvernements, contrôlent des fonds destinés à des communautés locales et gèrent (ou co-gèrent) des Aires protégées, qui font parfois la superficie d'un pays entier.
Souvent, les peuples autochtones ne sont informés des projets consistant à dérober leurs terres que lorsque les expulsions démarrent.
Pour s'assurer de tenir les Autochtones à distance, des gardes, financés et soutenus par l’industrie de la conservation, brûlent des maisons, chassent des familles entières et commettent des atrocités telles que des passages à tabac, des actes de torture ou même des meurtres. Ces mêmes organisations minimisent ces abus, qu'elles disent être le fait de “quelques éléments isolés”. Mais des études indépendantes démontrent que le problème est en réalité systémique et ancré dans le modèle militarisé de la conservation-forteresse.
“Le WWF est arrivé dans notre forêt, a défini des frontières sans notre consentement et nous a dit que nous ne pouvions plus aller là-bas. Les gardes battent les gens, mais ils ne protègent pas les éléphants.” - Membres du peuple baka, Congo
“Nous ne voulons pas d'argent. Nous voulons vivre librement dans la forêt. Les peuples, la forêt et les animaux ne font qu'un”. - Homme du peuple jenu kuruba, Inde
Une fois leurs terres volées, les peuples autochtones deviennent dépendants d'aides financières, souvent versées par ces mêmes organisations responsables de leurs expulsions, qui prétendent “compenser” la perte de leurs droits fondamentaux en fournissant des “moyens de subsistance alternatifs”. Ils ne peuvent plus nourrir leurs familles, se rendre sur les tombes de leurs ancêtres ou transmettre leurs connaissances à leurs enfants. Ce modèle anéantit les peuples autochtones et les liens uniques qu'ils entretiennent avec leurs terres.
Pendant ce temps, des touristes et des chasseurs de trophées “explorent” leurs terres ancestrales pour le plaisir, et des institutions comme l'UNESCO ou l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) font l'éloge de ces lieux en les désignant comme des Sites classés au patrimoine mondial de l'humanité ou comme des remparts contre la destruction de l'environnement.
Difficile à croire ? Écoutez les témoignages de représentants et représentantes de peuples autochtones ayant vécu les crimes de la conservation.
Les grandes organisations de conservation et les gouvernements qui les financent sont au courant des atrocités commises depuis de nombreuses années, parfois des décennies. Pourtant, ils continuent de soutenir la conservation coloniale, écartant toute possibilité de gestion des terres par les peuples autochtones. Certaines organisations de conservation ont même dissimulé des rapports faisant mention d’abus.
Grâce à leur image inoffensive, les organisations de conservation n'ont quasiment jamais été tenues de répondre de leurs actes, et ce bien que le droit international les contraigne, elles et leurs bailleurs de fonds, à obtenir le consentement des peuples autochtones et à s’abstenir de développer tout projet qui constituerait une violation de leurs droits.
Un modèle défaillant et basé sur le profit
Les expulsions des peuples autochtones ne signifient pas que les terres soient inaccessibles pour tout le monde.
Dans certains endroits, les riches touristes peuvent pratiquer la chasse aux trophées en payant plusieurs milliers de dollars, alors que la chasse de subsistance est interdite aux communautés locales. Dans d’autres endroits, le tourisme et l’extraction de ressources, telle que “l’exploitation forestière durable”, sont tolérées. Des entreprises sont même partenaires d’organisations de conservation. Par ailleurs, les organisations de conservation et les gouvernements utilisent de plus en plus les Aires protégées pour générer des crédits carbone, qui sont ensuite vendus à des entreprises telles que Meta ou British Airways pour verdir leur image.
“Ils [Conservation International] ne s’intéressent qu’à leurs financements et à comment les dépenser... Ils ne s’intéressent pas à la forêt.” – Membre du peuple kuy, Cambodge
“Des touristes amènent des déchets plastiques qui tuent nos animaux. Cela nous inquiète, mais ils appellent ça de la conservation.” – Husain Swamy, peuple chenchu, Inde
Cette attitude à deux poids, deux mesures est justifiée, selon les grandes organisations de conservation, par le fait que de telles activités génèrent des fonds importants pour la conservation. Elles affirment avoir besoin de lever 700 milliards de dollars par an. Mais un modèle de conservation différent, qui garantit les droits territoriaux des peuples autochtones, permet d’obtenir des résultats équivalents ou supérieurs en termes de conservation, et ce pour un coût bien inférieur.
La conservation est devenue une industrie, et les grandes organisations de conservation sont devenues des multinationales. Elles nuisent aux personnes les moins responsables de la perte de biodiversité et du changement climatique, tout en répondant aux besoins de ceux qui détruisent l’environnement.
Rejoignez le combat pour un meilleur modèle de conservation
Aidez-nous à mettre fin à ce modèle de “conservation” qui anéantit les meilleurs alliés de l’environnement. Il est temps d’opter pour une meilleure approche, qui reconnaisse le rôle des peuples autochtones dans leur combat pour la protection de leurs terres et qui respecte leurs droits. Ils étaient des experts de la conservation bien avant que le terme “conservation” ne soit inventé.
Dans de nombreux endroits du monde, les peuples autochtones résistent à la conservation coloniale. Ils organisent des manifestations, remettent en question les idées reçues à propos de la “nature” et réclament ce à quoi ils ont légitimement et juridiquement droit. Un grand nombre d’entre eux fait face à des violences ou des intimidations du fait de leur combat. Depuis plus de 30 ans, Survival International les soutient et fait campagne pour mettre fin aux abus perpétrés au nom de la conservation. Voici nos objectifs et ce que vous pouvez faire pour nous aider à les atteindre :