Un écologiste kenyan faussement accusé de « braconnage »
21 Juillet 2020
Cette page a été créée en 2020 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.
Le Dr Mordecai Ogada, un écologiste kenyan renommé et consultant auprès de Survival International, a été menacé par des gardes armés et accusé de « braconnage ».
Le samedi 18 juillet, le Dr Ogada roulait avec ses enfants sur une route publique au nord-ouest de Nanyuki (dans la région du Mont Kenya). Ils s’étaient arrêtés pour regarder les animaux à proximité lorsqu’un véhicule conduit par un garde armé de la « réserve » voisine, OI Jogi s’est approché. Le garde leur a dit de circuler et qu’ils n’étaient pas autorisés à prendre des photos. Ogada a refusé. Le garde a demandé des renforts par radio et, pointant son fusil directement sur Ogada et les enfants, a dit : « Les braconniers sont des gens comme vous. » Un autre véhicule est rapidement arrivé sur place avec davantage de gardes armés. Ogada les a mis au défi de tirer, puis est parti.
Le Dr Ogada, écrivain et professeur d’université, a déposé une plainte officielle auprès du ministère du Tourisme et de la Faune, qui a demandé lundi une enquête sur l’incident.
Ol Jogi est l’une des quelques soixante « réserves » privées du Kenya. Située sur des terres utilisées par les éleveurs massaï et samburu, une grande partie du territoire autour de Nanyuki a été prise aux éleveurs et donnée par le Royaume-Uni aux colons après 1920, lorsque le Kenya est devenu une colonie britannique. Dans les années 1990, alors que l’agriculture s’avérait moins rentable, nombre de ces ranchs ont été transformés en « réserve » avec l’aide de l’ONG américaine The Nature Conservancy.
Ol Jogi a été l’un des nombreux à construire des logements de luxe et une piste d’atterrissage pour faire venir les touristes directement de l’aéroport international de Nairobi. Le séjour minimum coûte 34.200 dollars pour voir une image de “l’Afrique sauvage” qui est en partie artificielle. De nombreux animaux, dont les rhinocéros, ont été amenés d’autres régions, notamment d’Afrique du Sud. Ol Jogi est soutenu par Save the Rhino International.
Ol Jogi était la propriété du milliardaire français et chasseur de gros gibier Alec Wildenstein, décédé en 2008. La famille a été acquittée de fraude fiscale et de blanchiment d’argent en France dix ans plus tard. La propriété appartient désormais à son fils, Alec Jr.
La seule base africaine de l’armée britannique se trouve à 30 km de là. Elle forme des écogardes au travail « anti-braconnage ». Lorsqu’il était ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson a visité la base en mars 2017. Le logement où le prince William a demandé Kate en mariage se trouve à environ 65 km d’Ol Jogi.
Stephen Corry, le directeur international de Survival, qui connaît l’endroit où l’incident a eu lieu, a déclaré aujourd’hui : « De nombreuses "réserves" sont des fiefs pour les ultra-riches qui se font passer pour des zones de protection de la nature. Ce ne sont que les dernières manifestations d’un écofascisme qui se trouve au cœur de la conservation coloniale en Afrique depuis un siècle. De nombreux soi-disant “braconniers” ne sont que des locaux qui vaquent à leurs occupations légitimes. Dans certaines régions, ils peuvent collecter des plantes médicinales ou chasser pour nourrir leur famille. Dans le centre du Kenya, il s’agit probablement d’éléveurs qui essaient d’utiliser leurs pâturages traditionnels et leurs routes pour se rendre au marché. Menacer Mordecai Ogada est révélateur d’un scandale qui doit être exposé, surtout maintenant que les grandes ONG de protection de la nature veulent transformer 30 % du globe en “zones protégées”, ce qui entraînera davantage de vols de terres, une militarisation accrue et appauvrira des centaines de millions de personnes. Cela suscitera une telle colère que cela conduira à la fin de la conservation de la nature en Afrique. »