Kenya : le projet de compensation carbone utilisé par Netflix et Meta ENCORE suspendu
13 Mai 2025

© Beckwith & Fisher
Un programme très controversé de crédits carbone au Kenya, qui menace les éleveurs autochtones, a été suspendu pour la deuxième fois par Verra, le principal organisme de certification de ce type de projets. Il s'agit d'une mise en cause sans précédent du programme, qui met en évidence les échecs répétés de Verra.
Le projet “Northern Kenya Rangelands Carbon Project” est considéré comme le plus grand projet au monde de séquestration de carbone dans les sols. Il est controversé depuis des années, car il restreint fortement les pratiques traditionnelles de pâturage des Massaï, Borana, Samburu et autres peuples éleveurs de bétail dont les terres ont été utilisées pour générer des crédits carbone. Les entreprises Netflix et Meta ont toutes deux acheté des crédits carbone issus de ce programme.
En janvier, un tribunal kényan a infligé un revers majeur au projet en statuant que deux des plus grands conservatoires (“conservancies”) mis en place par le Northern Rangelands Trust (NRT) avaient été établis de manière inconstitutionnelle, sans aucune base légale. L’un d’entre eux, Biliqo Bulesa, génère environ 20 % des crédits carbone du projet. Cette décision pourrait s’appliquer à la moitié des autres conservatoires impliqués dans le projet de crédits carbone.
Il y a deux ans, Survival International publiait le rapport “Blood Carbon : comment un programme de compensation des émissions de carbone rapporte des millions de dollars grâce aux terres autochtones du nord du Kenya”, une critique accablante du projet.
La première suspension et révision du projet par Verra en 2023 suite au rapport de Survival avait abouti à une dissimulation choquante.
Dans une interview publiée aujourd’hui dans le Wall Street Journal, Hassan Bidhu, l’un des plaignants dans l’affaire judiciaire, a déclaré : « Le projet a complètement détruit le système traditionnel et en a introduit un autre, qui équivaut à un déplacement. »
Selon le Wall Street Journal, le NRT a vendu plus de 6 millions de crédits carbone, d’une valeur comprise entre 42 et 90 millions de dollars, selon les prix du marché.
Caroline Pearce, directrice de Survival International au Royaume-Uni, a déclaré aujourd’hui : « Le programme de crédits carbone du NRT viole les droits des peuples autochtones depuis le début et est devenu un véritable fiasco. Il est incompréhensible qu’il ait pu être approuvé par Verra en premier lieu. Il devrait maintenant être annulé une fois pour toutes, au même titre que toute initiative fondée sur la violation des droits des peuples autochtones pour générer des crédits carbone. »
« Les droits territoriaux des Massaï, Borana, Samburu et des autres peuples autochtones pastoraux doivent enfin être pleinement reconnus. Ce serait non seulement un acte de justice, mais aussi la meilleure manière de protéger les prairies d’Afrique de l’Est. »
