Violations des droits humains : Survival International porte plainte contre une organisation de protection de la nature

16 Février 2016

Depuis que les Baka ont été expulsés de force de leurs forêts, leur santé est en déclin. Ils vivent désormais en bordure de routes et sont fortement exposés à des maladies telles que la malaria. © Freddie Weyman/Survival

Cette page a été créée en 2016 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.

Survival International, le mouvement mondial pour les droits des peuples indigènes, a déposé une plainte devant l’OCDE au sujet des activités soutenues par le WWF au Cameroun. L’organisation finance des brigades anti-braconnage qui ont commis de violents abus sur des membres de la communauté baka. Elle soutient également des zones protégées sur les territoires des Baka auxquelles ils sont interdits d’accès.

C’est la première fois qu’une requête est présentée devant l’OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques – à l’encontre d’une organisation de protection de la nature par le biais d’une procédure généralement réservée aux entreprises multinationales.

La plainte reproche au WWF d’avoir été impliqué dans des actes de violence et dans la spoliation de terres de ‘Pygmées’ baka au Cameroun. Le WWF soutient des zones protégées auxquelles les Baka sont interdits d’accès ainsi que des brigades anti-braconnage. Ces dernières frappent et torturent depuis plus d’une décennie des femmes et des hommes baka, ainsi que d’autres membres de tribus des forêts tropicales.

Les ‘Pygmées’ baka sont des chasseurs-cueilleurs qui vivent de manière durable depuis des générations dans les forêts tropicales d’Afrique centrale. L’importance qu’ils accordent à la forêt, en tant que refuge matériel et spirituel, source de leur religion, de leurs moyens d’existence, de leur pharmacopée et de leur identité culturelle ne peut être sous-estimée.

Des Baka ont, à de nombreuses reprises, fait part à Survival des activités de ces brigades dans la région. Par exemple, en 2015, un Baka a rapporté : ‘Quand ils [les gardes forestiers] sont arrivés chez nous, nous dormions, ma femme et moi. Ils m’ont frappé avec une machette. Ils ont aussi frappé ma femme’.

Avant de commencer ses activités au Cameroun, le WWF n’a pas pris en compte les conséquences qu’elles engendreraient sur les Baka. Par conséquent, l’organisation internationale de protection de la nature a contribué à de graves violations des droits humains. Elle a non seulement outrepassé la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et les principes directeurs de l’OCDE concernant les droits humains mais également sa propre politique concernant les peuples indigènes. L’équipe juridique de Survival a donc décidé de déposer une plainte officielle.

Depuis des générations, les Baka chassent et cueillent de manière raisonnée dans la forêt tropicale d'Afrique centrale. © Selcen Kucukustel/Atlas

Aujourd’hui, l’exploitation forestière et minière ainsi que le trafic d’espèces protégées continuent. Ces activités inquiètent les peuples indigènes. Leurs territoires sont en train d’être détruits, alors même que l’accès à de grandes parties de ces terres leur est interdit au nom de la protection de la nature.

‘Ils laissent les éléphants mourir dans la forêt alors même qu’ils nous empêchent de manger’, a raconté un Baka à Survival en 2013.

Survival International appelle à adopter une nouvelle approche de la protection de la nature qui respecte les droits des communautés indigènes. Ces dernières dépendent de leur environnement et le gèrent depuis des millénaires. Malgré cela, de grandes organisations de protection de la nature établissent des partenariats avec des agences de tourisme et des entreprises dont les activités nuisent aux peuples indigènes. Ils sont les meilleurs défenseurs de l’environnement et devraient donc être au coeur des politiques de protection de la nature.

Stephen Corry, directeur de Survival International, a déclaré : ‘Le WWF sait pertinemment que les gardes forestiers financés par ses sympathisants pour protéger la nature commettent de manière répétée de graves abus à l’encontre des Baka. Leurs terres ont été volées pour créer des zones protégées et certains d’entre eux ont même été torturés. Malgré cela, l’organisation s’est contentée de faire des déclarations publiques pour contrecarrer les critiques mais n’a pas mis fin à ces abus. Elle exhorte des entreprises à respecter les principes directeurs de l’OCDE alors même qu’elle les outrepasse constamment. Cela fait des décennies que les droits humains sont violés par la mise en place de projets de développement et de protection de la nature. Des millions de personnes en Afrique et en Asie ont souffert de ces projets. Il est temps aujourd’hui que ces grandes organisations réagissent. Si le WWF ne peut pas empêcher les brigades anti-braconnages qu’il finance de porter atteinte aux Baka, alors peut-être devrait-il reconsidérer sa présence sur leurs territoires’.

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