Une enquête accablante de l'ONU condamne le projet phare du WWF au Congo et révèle l'ampleur massive des abus

10 Février 2020

Une femme Baka dont le mari, nommé Komanda, a été arrêté par des gardes forestiers à Messok Dja, puis emprisonné sur de fausses accusations de braconnage. En prison, il a été brutalement agressé par d’autres prisonniers et est mort peu après sa libération. © Survival International

Cette page a été créée en 2020 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.

Selon une nouvelle enquête dévastatrice de l’ONU, un projet du WWF en Afrique centrale est responsable d’abus et de violations des droits à une échelle choquante.

Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a lancé une enquête sur le projet controversé de transformer la région de Messok Dja au Congo en un parc national ; cette enquête fait suite à une plainte officielle déposée par Survival International en 2018. Le journal britannique The Guardian a obtenu une copie des conclusions préliminaires de l’enquête.

Josi, un homme baka. Sa nièce de 10 ans, Christine Mayi, a été attaquée par des gardes forestiers soutenus par le WWF en 2011 et est morte par la suite. Après l’ouverture d’une enquête sur cette affaire, les gardes forestiers sont retournés au village et ont attaqué sa famille, qui s’est ensuite enfuie en passant la frontière. © Survival International

C’est la première fois que l’ONU enquête sur un projet du WWF, et ses conclusions sont accablantes :

- Les gardes forestiers armés soutenus par le WWF frappent et maltraitent fréquemment les « Pygmées » baka vivant à Messok Dja.

- Le projet a causé « des traumatismes et des souffrances » aux Baka.

- Le PNUD, l’un des bailleurs de fonds du projet, a violé ses propres politiques et normes en soutenant le projet sans avoir obtenu au préalable l’accord des Baka. Ils n’ont pas pris la peine de demander ce consentement, car ils ont simplement supposé qu’un projet de « conservation » de la nature serait bénéfique aux Baka.

- Le projet a utilisé des « indicateurs quantitatifs » pour mesurer son succès, tels que le nombre de patrouilles anti-braconnage et le nombre d’arrestations. Il n’est pas surprenant que de nombreux Baka innocents aient été arrêtés et emprisonnés. Le rapport indique que les rangers « ont pénalisé les cibles les plus faciles ».

- Le projet s’est poursuivi sans l’accord des Baka, violant ainsi le droit international et la politique interne du WWF.

- Bien que le WWF ait déclaré aux bailleurs de fonds du projet qu’ils étaient engagés dans un « processus de consultation » depuis 2017, le WWF a une « compréhension limitée du concept de mise en œuvre [du consentement]. Informer les communautés qu’un parc national sera créé empêche d’exercer ce droit [de refuser le consentement] ».

- Le WWF a soutenu que les continuelles violations des droits humains n’étaient que des « incidents isolés ».

- Le projet n’a eu aucun impact sur « le démantèlement des réseaux criminels qui se cachent derrière le commerce illégal de la faune et de la flore sauvages ».

L’enquête a obtenu des témoignages très accablants de gardes forestiers armés battant les Baka : « Les passages à tabac touchent aussi bien les hommes et les femmes que les enfants. D’autres rapports font état d’écogardes pointant une arme sur un Baka pour le forcer à frapper un autre Baka. D’autres disent que les écogardes ont emporté les machettes des Baka, puis les ont battus avec ces machettes. On rapporte que des écogardes ont forcé des femmes baka à se déshabiller et à être “comme des enfants nus”. Il y avait une réticence culturelle palpable des femmes à parler de ce qui s’était passé, sauf pour dire qu’il s’agissait d’honteuses “humiliations”. »

Stephen Corry, directeur de Survival International, a déclaré aujourd’hui : « C’est un acte d’accusation dévastateur qui devrait sonner le glas du modèle de “conservation-forteresse” du WWF qui a causé tant de dommages aux populations et à l’environnement à travers l’Afrique.

« Des millions ont déjà été dépensés pour le projet de parc, dont une grande partie provient d’entreprises d’exploitation forestière, d’huile de palme et de tourisme, ainsi que d’ONG de protection de la nature. Elles travaillent ensemble pour voler les terres des Baka. Des gardes forestiers, qui terrorisent les Baka locaux depuis des années, ont été mis en place.

« Toutes les politiques et les lois des Nations unies pertinentes concernant le respect des peuples autochtones et des droits humains ont été ignorées dès le début, car on a estimé qu’un projet de conservation de la nature se plaçait en quelque sorte au-dessus d’elles.

« Tout cela parce qu’il était beaucoup plus facile de cibler des hommes, des femmes et des enfants baka innocents que de défier les réseaux criminels, qui comprennent parmi eux des fonctionnaires locaux et gouvernementaux. Aucun de ces abus ne semblait avoir le moindre effet sur la réduction du braconnage.

« Il y a trente ans, nous avons dit au WWF que ses projets dans le bassin du Congo risquaient de priver les populations autochtones locales de leurs terres et de leur autosuffisance, et de les réduire à la misère. Nous avons répété cet avertissement à plusieurs reprises, mais il est tombé dans l’oreille d’un sourd. Le WWF est engagé dans un vol de terres et dans des violations flagrantes des droits humains à grande échelle. »

Baka
Peuple

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