Les Papous exigent des excuses

5 Février 2013

Benny Wenda, leader papou, affirme que les propos de Jared Diamond sur son peuple sont mensongers. © freewestpapua.org / Survival

Cette page a été créée en 2013 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.

Des chefs tribaux de Papouasie occidentale ont exigé des excuses de la part de Jared Diamond, un auteur controversé d’ouvrages de vulgarisation scientifique, pour les avoir décrits comme des êtres féroces, arriérés et belliqueux dans son nouveau livre The World Until Yesterday : What Can We learn from Traditional Societies? (non encore paru en français).

Les Papous attaquent l’argument central de Diamond, qui établit que ‘la plupart des petites sociétés (…) sont prises au piège dans des cycles de violence et de guerre’ et que ‘les Papous apprécient les bénéfices de la paix garantie par l’Etat qu’ils n’ont pas réussi à atteindre sans son intervention’.

Diamond ne mentionne aucunement la brutalité et l’oppression dont sont victimes les tribus de Papouasie occidentale, sous tutelle indonésienne depuis 1963, et qui ont entraîné la mort d’au moins 100 000 Papous entre les mains de l’armée indonésienne.

Benny Wenda, un chef tribal, a déclaré à Survival : ‘Ce qu’il (Jared Diamond) a écrit sur mon peuple est mensonger (…) il ne dit rien sur ce que l’armée indonésienne nous fait subir (…) J’ai vu de mes propres yeux les soldats indonésiens tuer mon peuple, je les ai vu violer ma propre tante. L’Indonésie a fait croire au monde entier qu’il s’agissait d’une ‘guerre tribale’ – ils ont essayé de faire croire que les violents c’étaient nous et pas eux – ce livre fait la même chose. Il devrait s’excuser’.

Markus Haluk, un membre important du Conseil coutumier papou, a ajouté : ‘Le nombre de victimes dani [l’une des ethnies les plus nombreuses de Papouasie] aux mains des Indonésiens ces cinquante dernières années est beaucoup plus élevé que celui occasionné par les guerres tribales dani depuis des centaines de milliers d’années’.

Le livre de Jared Diamond est fortement critiqué pour avoir qualifié les peuples indigènes de 'guerriers vivant encore dans le passé’ © Survival International

Matius Murib, directeur de Voix baptiste de Papouasie, a énergiquement condamné l’affirmation de Diamond selon laquelle les peuples indigènes vivraient dans un ‘monde d’hier’: ‘Ce livre répand des préjugés sur les Papous (…) qu’ils mènent toujours le même mode de vie depuis des centaines d’années. Ce n’est pas vrai et cela vient renforcer l’idée que les peuples indigènes sont ‘arriérés’, ‘vivent dans le passé’ et sont des ‘reliques de l’âge de pierre’.

Le Révérend Socratez Yoman, chef de l’Eglise baptiste de Papouasie occidentale, a également exigé des excuses de la part de Jared Diamond.

Dominikus Surabut, actuellement incarcéré pour trahison après avoir pacifiquement milité pour l’indépendance de la Papouasie occidentale, a qualifié la relation des Papous occidentaux avec l’Etat indonésien d’apartheid politique. Dans une déclaration qu’il a pu faire parvenir clandestinement depuis sa cellule, il dit : ‘C’est bien là la nature même et l’expression de l’occupation coloniale des peuples indigènes qui se caractérise par leur traitement en citoyens de seconde zone et dont l’oppression est justifiée par leur arriération, leur archaïsme et leur caractère belliqueux – tel que le suggère Jared Diamond dans son livre sur les peuples indigènes’.

Survival International et TAPOL, une organisation de promotion des droits de l’homme en Indonésie basée au Royaume-Uni, ont reçu de nombreuses déclarations indignées après les sévères critiques du livre de Jared Diamond émises par Survival. L’ouvrage a, depuis, fait l’objet de débats houleux lors de la visite de Jared Diamond au Royaume-Uni.

Lire la version complète des déclarations (en anglais).

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